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Concert

OrfeO di Cracovia

J.S. BACH, G. P. TELEMANN, G. F. HAENDEL, M. MARAIS

Mardi 20 juin 2023 à 20h
Temple d’Arles
Magdalena D. Kobija, viole de gambe
Maciej Skrzeczkowkski, clavecin
Jean-Pierre Menuge, flûte

Entrée 15 euros, tarifs réduits 10 euros, gratuit avant 16 ans
Réservations et informations : 06 30 49 44 29
Baroque ? Entretien avec JP Menuge

Note sur le concert
Dans une belle diagonale qui conduira Orfeo 2000 à travers la France les musiciens d’Orfeo 2000 vous invitent à partager le programme qui fera revivre les caractères de la musique baroque. A l’invitation de l’Association Sarabande, Orfeo 2000 s’installe à nouveau au Temple Réformé et vous invite à goûter son acoustique exceptionnelle. Une même passion de la musique ancienne réunit ces musiciens chaque année pour une tournée de concerts d’été à travers la France. Les musiciens invités par Jean-Pierre Menuge, Professeur honoris causa du Conservatoire F. Chopin de Cracovie, défendent chacun à leur façon une conception expressive, vivante, sincère du répertoire baroque, guidés par une expérience confirmée du concert mais, avant toute chose, par le plaisir de la rencontre à travers la musique.
A travers des programmes pleins de vie, ils sauront vous convaincre, si cela était nécessaire, que la musique ancienne, souvent drôle et pleine d’humour, n’a pas pris une ride et parle plus que jamais à notre sensibilité contemporaine. Sans doute parce que le plaisir, qu’on la fasse ou qu’on l’écoute, fut sa première fonction.

Programme
Jean-Marie LECLAIR (1697-1764)
Sonate en trio op. 2, n° 8 en ré majeur
Adagio-allegro-sarabanda-allegro assai
Flûte de voix, viole et basse continue

Georg-Friedrich HÄNDEL (1685-1759)
Sonate en la mineur
Larghetto-allegro-adagio-allegro
Flûte et basse continue

Johann-Sebastian BACH (1685-1750)
Sonate en mi majeur BWV 1035
Adagio ma non tanto-allegro-siciliano-allegro assai
Flûte et basse continue

Pause

Marin MARAIS (1656-1728)
Suite en fa majeur (Pièces de viole Livre IV)
Prélude-allemande-gavotte-gigue-menuet I & II-la Provençale-chaconne
Viole et basse continue

Johann-Sebastian BACH (1685-1750)
Suite française N°2 en do mineur (BWV 813)
Clavecin seul

Georg Philipp TELEMANN (1687-1778)
Sonate en trio en fa majeur
Vivace-mesto-allegro
Flûte, viole de gambe et basse continue

                                

 

Magdalena K. Dobija, viole de gambe

Née à Cracovie, Magdalena a abordé l’étude du violoncelle au lycée Musical Frédéric Chopin. Elle est diplômée de l’Université de Katovice dans la classe de Piotr Janosik (violoncelle) et de l’université de Wrocław dans la classe de Kazimierz Pyzik (viole de gambe). Elle s’est perfectionnée auprès de maîtres tels que Roel Dieltiens, Piet Kuijken, Irene Klein, Sara Ruiz, Cecylia Barczyk, Alexander Gebert, Arto Noras, Frans Helmerson, Richard Duven… et a participé à plusieurs stage d’interprétation pour la musique ancienne animés par Jean-Pierre Menuge. Elle est lauréate de nombreux concours de musique de chambre en Slovaquie, Pologne, Hongrie et s’est produite aux côtés de musiciens tels que Marek Toporowski, Tomasz Strahl, Kaja Danczowska, Elzbieta Stefanska, Klaudiusz Baran, Marcel Chyrzynski. Elle est aujourd’hui diplômée du Conservatoire Royal de La Haye (Pays-Bas) dans le classe de Mieneke van der Velden.

Maciej Skrzeczkowski, clavecin
Après avoir étudié le piano à Varsovie, Maciej se tourne vers le clavecin qu’il approfondit entre autres maîtres auprès de Pierre Hantaï, Christophe Rousset, Elżbieta Stefańska… Comme pianiste il donne de très nombreux concert et récitals en Pologne mais aussi en Italie. Il est lauréat de plusieurs concours internationaux, Concours International de clavecin de Milan, Concours Wanda Landowska, Concours de Musique de Chambre de Torun et de Bydgoszcz. Il s’est déjà produit dans de nombreux Festivals de Musique Ancienne Utrecht, Amsterdam, Urbino, Katowice… En 2021, il fonde avec la gambiste Magda K. Dobija l’ensemble Le Trèfle fleuri qui lui permet de parcourir un vaste répertoire de musique française tant au clavecin qu’au piano-forte.

menuge

Pierre Menuge, flûte à bec
Vouant à la flûte à bec, à la musique ancienne et à la facture de clavecin une passion de longue date, Jean-Pierre met à son actif de très nombreux concerts en France, ainsi qu’en Angleterre, en Allemagne, aux Pays Bas, en Belgique, en Suisse, en Roumanie, en Pologne où il anime depuis près de 10 ans un stage d’interprétation sous l’égide du Ministère de la Culture. Professeur honoris causa du Conservatoire Frédéric Chopin de Cracovie, il s’est produit aux côtés de très nombreux musiciens dont certains aussi prestigieux que James Bowman ou Jaap Schröder, Bruno Cocset ou Elisabeth Joyé. Il a eu l’occasion de collaborer à des productions cinématographiques (« George Dandin », « Louis, Enfant Roi » de Roger Planchon) Il a été l’invité d’honneur des Philharmonies de Cracovie en Pologne, de Timisoara, de Cluj en Roumanie. Il est ou a été directeur artistique de plusieurs programmations en France dont
Musiques en Ecrins dans les Hautes Alpes, les Heures Musicales de la Vallée de la Bresle en Normandie, Baroque en Forez. C’est un de ses instruments, copie de Tibaud (1691 Toulouse) sortis de son atelier que l’on entendra lors de ce concert.

Baroque ?… Entretien avec Jean Pierre Menuge Pierre Menuge, flûte à bec

Jean-Pierre, le baroque, en deux mots ?

J. P.  Menuge :  Mouvement, émotion… « L’homme n’est jamais plus semblable à lui-même que lorsqu’il est en mouvement. » dit le Bernin. À la fin du XVIe siècle se produit une des plus grandes transformations idéologiques et esthétiques de l’histoire de l’Occident, entre Renaissance et Baroque.
L’art baroque se définit d’abord comme un art du mouvement et de l’illusion qui emprunte son langage à celui des émotions et des passions, des “affetti” comme disent les Italiens. Le retour aux sources de l’Antiquité est à l’origine d’un nouvel idéal: les arts peuvent « émouvoir, rendre meilleur, changer et apaiser les sentiments ». Et ce n’est pas un hasard si Colombo et Harvey avancent à la même époque que le sang n’est pas immobile dans le corps humain, mais qu’il circule sans arrêt dans toutes ses parties, pompé par le cœur.

S’il s’agit d’un art du mouvement, alors la danse y est capitale ?

J. P.  Menuge : Oui ! Art du mouvement par excellence, la danse inspire la musique… C’est elle qui lui donne sa pulsation et son caractère. Allemandes, sarabandes, gavottes, même lorsqu’elles ne disent par leur nom, sont au cœur des pièces vocales et instrumentales; on les retrouve jusque dans la musique sacrée.
« On a beaucoup discuté sur l’origine du mot baroque, on doit tenir à présent pour certain qu’elle est dans le mot portugais: barroco employé pour désigner la perle irrégulière. » (Victor L Tapié, Baroque et classicisme, 1980).
Qu’ils parlent peinture, littérature, sculpture, architecture ou musique, les théoriciens décrivent l’art baroque comme un art de l’exubérance et de l’artifice établi sur une
« forme ouverte », selon le mot d’Heinrich Wolfflin, sur une structure mouvante et libre où, au contraire des formes statiques cultivées par la Renaissance, chaque élément
plastique renvoie le regard du spectateur vers les éléments voisins. Les œuvres du baroque pictural ne laissent jamais l’œil en repos.

Quand la musique peut-elle donc être dite baroque ?

J. P.  Menuge : On admet que le baroque musical naît avec l’opéra au début du XVIIe et prend fin avec la mort de J.S. Bach en 1750 mais il est difficile de l’inscrire dans des limites strictement historiques. À côté de l’opéra et parallèlement à l’essor de la mélodie vocale, la musique instrumentale est assurément l’une des plus belles réalisations de l’art baroque. La virtuosité vocale se transmet aux instruments avec le même souci expressif et sensuel. Les changements soudains de rythme, la succession des tempi évoquent les contrastes des courbes et des contre-courbes, les oppositions dynamiques entre piano et forte les brusques alternances de lumière, et les ornements, souvent fruits de l’improvisation, dont les musiciens fleurissent les mélodies renvoient aux éléments décoratifs qui animent les architectures. Même le trompe-l’œil trouve son pendant dans une sorte de trompe-l’oreille, trait d’illusion auditive dont les figures de bariolage propres au violon donnent le meilleur exemple.

Peux-tu, Jean-Pierre, évoquer la liberté laissée aux interprètes dans la musique baroque ?

J. P. Menuge : Liberté précieuse, oui, qui maintient vivante cette musique, mais liberté informée…
L’esthétique baroque est en effet un art de l’ornementation: à partir d’un texte parfois extrêmement dépouillé, l’interprète, toujours guidé par le « bon goût », doit agrémenter ce texte d’un auteur pour lui donner sa pleine expression. Quantz écrit dans son Traité pour la flûte traversière qu’une musique doit autant à celui qui l’écrit qu’à celui qui la joue. Le baroque en musique est bien un art du discours, avec ses conventions, ses règles que les musiciens de l’époque partageaient avec leur public et que nous, auditeurs, musiciens du XXIème siècle, nous appliquons à réapprendre. Sonates italienne ou suites française baroques peuvent être comprises comme un jeu de conversations entre voix de « dessus » et voix de « dessous » qui échangent leurs répliques et déclament leurs tirades.

Quelle est la place du « vieux » contrepoint, dont Bach est un maître, dans cette nouvelle esthétique qu’est le baroque dans la musique ?

J. P. Menuge : Le passage de la Renaissance au Baroque, aussi radical soit-il, ne constitue en aucune façon une rupture. Le XVIIe siècle conserve les acquis du siècle précédent et la solidité structurelle demeure, sous l’apparence de l’exubérance désordonnée. La musique ne rejette pas les bénéfices de l’ancienne polyphonie: érigeant lentement de nouvelles formes, elle intègre, dans la création du style concertant, les éléments contrapuntiques qui peuvent toujours séduire l’oreille. Ainsi la sonate en trio utilisera les procédés de l’imitation et le Baroque musical créera bientôt la fugue, dernier fleuron de l’art polyphonique. Mais n’oublions jamais que toutes ces pièces furent d’abord écrites pour le plaisir. C’est donc pour le plaisir que nous vous les offrons, le vôtre de les entendre, le nôtre de les jouer.